Arthus et le Royaume des Ombres Douces

Arthus et le Royaume des Ombres Douces

Histoire écrite par Valentin Dubrulle

Il y a très longtemps — ou peut-être demain —, un garçon nommé Arthus vivait dans un village suspendu entre ciel et terre. Ses maisons flottaient grâce à de grandes bulles d’air fixées sous les planchers, et pour se rendre chez les voisins, on sautait de bulle en bulle, comme sur des nuages.

Arthus avait douze ans et rêvait de devenir un Héros. Pas un héros en armure brillante. Non. Un héros silencieux, qui fait les choses bien, sans demander de récompense.

Un matin, alors qu’il traversait le marché flottant pour aller chercher du pain nuage, une grande ombre passa au-dessus du village. Le ciel se grisa. Le vent s’arrêta.

Puis, dans un bruit de bruissement étrange, les Ombres Douces descendirent.

Elles n’étaient pas méchantes. Pas vraiment. Mais elles avaient faim de lumière, et en quelques minutes, les lanternes, les étoiles même, disparurent du ciel. Tout devenait pâle, silencieux, immobile.

Le Conseil des Grands-Moustachus (ceux qui prenaient les décisions importantes) déclara : — « Il faut envoyer quelqu’un chercher l’Éclat Perdu, seul capable de rallumer la lumière ! »

Tout le monde recula d’un pas.

Sauf Arthus.

— « Je peux essayer, » dit-il, la voix tremblante.

On lui donna un simple sac, une corde tressée avec des fils de rire (qui ne casse jamais), et une vieille carte qui sentait la pluie.

Arthus sauta de bulle en bulle, franchit la mer de Miroirs (où ton reflet essaye de te retenir), escalada la Tour Sans Escalier (grâce à sa corde magique), et affronta la Pluie Qui Chante Faussement (qui essayait de te faire danser à l’envers).

Enfin, au sommet d’une montagne trouée, il trouva l’Éclat : une petite pierre, toute simple, pas plus grosse qu’un caillou de poche, mais chaude et lumineuse comme mille soleils.

Mais au moment où il tendit la main… une Ombre Douce surgit.

Elle n’était pas laide ni effrayante. Elle avait la forme d’un rêve oublié, d’un câlin perdu. Et elle murmura :

— « Pourquoi veux-tu nous voler ce qui nous réchauffe ? »

Arthus comprit alors que les Ombres Douces n’étaient pas des monstres. Elles étaient juste perdues, tristes, privées de leur propre lumière.

Alors il fit quelque chose d’incroyable : il partagea l’Éclat.

Il en laissa une part aux Ombres, qui s’illuminèrent doucement, prenant des teintes roses, bleues, dorées… Et avec la moitié restante, il rentra au village.

Quand il revint, le ciel retrouva ses couleurs, les bulles reprirent leur danse, et les Ombres, devenues douces-douces, flottaient entre les maisons, veillant sur le sommeil des enfants.

Depuis ce jour, Arthus n’est plus un garçon ordinaire.

Il est devenu le premier Héros Flottant.
Pas pour avoir combattu.
Mais pour avoir compris.

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