Histoire écrite par Valentin Dubrulle
Dans un grand pré plein de couleurs et de parfums, toutes les fleurs vivaient selon la même règle :
« On s’ouvre au lever du soleil, on se ferme au coucher. Pas trop tôt. Pas trop tard. C’est comme ça. »
Et personne ne posait de question.
Sauf Camomille.
Camomille était une petite fleur blanche et jaune, toute simple mais pleine d’idées.
— « Mais pourquoi je devrais m’ouvrir quand le soleil me dit de le faire ? »
— « Et si j’ai envie de rester fermée un matin, juste pour rêver ? »
— « Et si je veux voir les étoiles, la nuit, au lieu de dormir tout le temps ? »
Les autres fleurs la regardaient avec inquiétude.
— « Mais enfin Camomille… on est des fleurs ! On suit le soleil ! C’est comme ça depuis toujours. »
Camomille, elle, haussa doucement ses pétales.
Et décida que non. Elle allait faire à sa façon.
Le lendemain matin, alors que toutes les fleurs s’étiraient sous les rayons dorés,
Camomille resta toute fermée.
— « Tu es malade ? » chuchota une marguerite.
— « Non. Je médite. »
Et le soir, quand toutes les autres se refermèrent avec un soupir…
Camomille s’ouvrit.
Et vit la lune se lever,
et les lucioles danser,
et les hérissons passer à pas feutrés.
Elle sentit le vent plus frais, plus doux, et entendit les étoiles fredonner des choses très lentes.
— « Oh, » murmura-t-elle, « je n’aurais jamais su tout ça si j’avais dormi. »
Les jours passèrent.
Camomille ouvrait quand elle voulait.
Parfois le matin. Parfois l’après-midi.
Parfois elle restait fermée toute une journée entière. Et parfois, elle restait éveillée toute une nuit, juste pour voir le ciel changer.
Et peu à peu, les autres fleurs s’approchaient.
— « Tu veux bien nous montrer ce que tu vois la nuit ? »
— « C’est comment, le lever de lune ? »
— « Et les étoiles… elles sentent quoi ? »
Alors Camomille racontait.
Et, sans même s’en rendre compte, elle semait des envies de liberté.
Aujourd’hui encore, si tu passes près du grand pré, tu verras que certaines fleurs s’ouvrent très tôt.
D’autres, très tard.
Et quelques-unes, pas du tout.
Mais toutes sourient doucement.
Parce qu’elles savent maintenant que le soleil donne l’heure… mais le cœur donne le rythme.