Tilio, le Colibri du Temps des Rêves

Tilio, le Colibri du Temps des Rêves

Histoire écrite par Valentin Dubrulle

Dans la Vallée des Brises, un endroit caché entre les collines de velours et les rivières de lumière, vivait Tilio.

Tilio n’était pas un colibri comme les autres.
Il n’avait pas le temps de butiner les fleurs ni de se poser sur une branche en sifflotant.

Non.
Tilio était le Gardien du Temps des Rêves.

Chaque soir, juste avant que les enfants ne ferment les yeux, il devait absolument passer dans chaque maison, vérifier que le sablier des rêves coulait bien, que la porte des songes était ouverte, que les papillons de sommeil étaient réveillés et prêts à emmener les rêveurs.

Tilio était minuscule, étincelant comme une gemme vivante, et il allait très très vite, tellement vite qu’on ne voyait souvent qu’un petit éclat vert et doré filer dans la nuit.

Mais surtout, Tilio était toujours en retard.

— « Oh ciel, oh ciel, j’ai déjà trois minutes de retard sur le premier sourire endormi ! » gazouillait-il en tourbillonnant.

Ce soir-là, pourtant, tout bascula.

Alors qu’il fonçait pour remettre d’aplomb la Pendule des Siestes à l’entrée de la Vallée, Tilio trébucha sur une étoile tombée.

PATAPLOUF !

Il atterrit dans une fleur géante et moelleuse, se couvrit de pollen brillant, et, pour la première fois depuis mille soirs…
il s’arrêta.

Autour de lui, tout semblait respirer doucement : les fleurs chantaient à peine perceptiblement, les arbres se balançaient au rythme d’une musique silencieuse, et les lucioles formaient des constellations mouvantes.

Tilio écouta.
Pour la première fois, il prit le temps d’écouter.

Il réalisa alors que les rêves ne devaient pas être poussés, ni pressés, ni bousculés. Ils devaient être inspirés, caressés par le souffle du soir, et venir d’eux-mêmes.

— « Un rêve, ça ne se force pas. Ça se danse, » murmura la vieille Fleur-Aube, la doyenne de la Vallée.

Tilio rougit de ses plumes jusqu’au bout du bec.

À partir de cette nuit-là, Tilio changea un peu.
Il continua à veiller sur le Temps des Rêves, bien sûr. Mais il ralentit. Juste assez pour souffler doucement sur les paupières, déposer un brin de sommeil sur les cœurs agités, et guider les rêves comme on guide une plume sur l’eau.

Et quand, le soir, tu vois passer une lueur dorée qui virevolte sans bruit près de ta fenêtre…
Peut-être est-ce Tilio, pressé — mais un peu moins qu’avant — de t’apporter un rêve tout neuf.

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