Histoire écrite par Valentin Dubrulle
Lulu était une bulle de savon.
Pas une bulle ordinaire.
Elle n’était pas plus grande, ni plus brillante que les autres.
Mais elle avait une idée très claire :
« Moi, je veux voir le monde ! Pas éclater tout de suite comme les autres. »
Les autres bulles, joyeuses, éclataient dans les airs en riant.
— « Paf ! »
— « Plic ! »
— « Plouf ! »
Mais Lulu, elle, esquivait les doigts des enfants, glissait entre les branches, montait plus haut, encore plus haut.
Elle volait.
Pas pour fuir, non.
Pour vivre un peu plus longtemps.
Elle passa près d’un moineau, qui la regarda d’un œil curieux.
— « Tu brilles joliment. Tu viens d’où ? »
— « Du souffle d’un petit garçon. Il m’a soufflée avec un sourire… mais je veux voir ce qu’il y a après le jardin.«
Le moineau la suivit un instant, puis repartit picorer.
Lulu monta plus haut.
Elle frôla un toit.
Sauta au-dessus d’un chat surpris.
Se faufila entre deux fils à linge.
Puis elle vit une chose qu’aucune bulle n’avait jamais vue :
la ville.
Avec ses immeubles géants, ses balcons fleuris, ses enfants qui rient aux fenêtres,
et même un vieil homme qui soufflait des bulles dans une tasse de thé, tout doucement.
Lulu s’approcha, curieuse.
— « Tu ne veux pas éclater, petite ? » demanda-t-il, les yeux brillants.
— « Pas encore, » répondit Lulu.
— « Alors monte. Le vent est doux aujourd’hui. »
Elle suivit le courant chaud.
Passa au-dessus d’un parc.
D’un marché.
Elle vit des choses incroyables :
Lulu sourit (si une bulle peut sourire).
Elle n’avait jamais été aussi pleine.
De reflets. De souvenirs. De lumière.
Mais doucement…
Le soleil baissa.
Le vent aussi.
Et Lulu sentit que son moment approchait.
Alors, juste avant d’éclater,
elle fit un dernier vol plané,
repassa devant la fenêtre du petit garçon qui l’avait soufflée…
… et éclata en silence, juste devant lui, dans un éclat de lumière dorée.
Le garçon cligna des yeux.
Puis sourit, sans trop savoir pourquoi.
Car parfois, une petite bulle peut vivre un très grand voyage.